44, 2000, 12 000, 34, 9/6…
Tout d’abord cela a été le poids, pris par mon médecin généraliste car mes parents s’effrayaient de ma perte de poids. Puis les calories qu’une diététicienne m’a demandé de consigner afin d’être sûre de manger le minimum, le poids des aliments. Puis la tension qui effrayait mon médecin et qui se demandait comment je tenais debout.
Puis les battements de cœur, bien trop faibles, la température, bien trop basse, la glycémie, presque inexistante…
Puis lorsque j’ai eu mon nouveau téléphone, le nombre de pas qui s’affichait sur l’écran de veille.

Des chiffres, des chiffres comme référence, des chiffres comme repère, des chiffres comme norme. Des chiffres qui permettaient à l’équipe soignante de juger de mon état, des chiffres qui me menaient la vie dure puisqu’ils me dictaient mon quotidien. Ne pas manger un aliment qui dépasse les X kcal aux 100 gr. Ne pas dépasser les X kcal dans la journée pour ne pas prendre de poids mais ne pas aller sous les X pour ne pas en perdre trop. Marcher au moins X pas. Ne pas goûter si j’avais pris plus de X g le matin.

Une calculatrice ambulante. Je suis devenue une pro dans la règle de 3 afin de savoir combien contenait une portion de tel ou tel aliment. Un répertoire du nombre de pas entre chez moi et La Poste, chez moi et le marché, chez moi et l’arrêt de bus. Je suis surtout devenue une véritable tyran envers moi-même.

A lire : et puis un jour, j’ai arrêté de me peser

Ma libération des chiffres s’est faite de manière progressive.
J’ai tout d’abord lâché le pèse-personne. Après une semaine en vacances en vadrouille, je me suis rendue compte que j’avais réussi à profiter de mon séjour sans trop penser à mon poids : des restaurants, du repos… Que mon poids ne s’était ni effondré, et n’avait ni décollé. J’ai alors décidé de me peser une fois par semaine, puis j’ai confié la pesée à ma diététicienne. Je ne deviens plus une boule de rage lorsque j’ai pris du poids et que je ne le « compense pas » (c’est-à-dire pas d’ « extra »), ni une boule de nerfs lorsque j’en perds. Ce qui m’évite de passer une semaine à fleur de peau alors qu’au final sur la semaine, mon poids n’a pas bougé.

Je me suis aussi libérée du comptage de calories grâce à ma diététicienne : on fonctionne par portion. Une portion de féculents c’est X.
Je reste dépendante de la balance mais ne me sens plus obligée de vérifier derrière le paquet les valeurs nutritionnelles. Bien sûr, cela ne s’effectue pas sans angoisses : et si cette marque était plus calorique que celle-là ?

Une autre astuce pour se détacher des calories : variez !

Si vous connaissez par cœur les calories de ce riz, changez de marque, prenez du boulgour, et empêchez-vous de retourner le paquet.
Parfois c’est plus fort que nous, mais comme dans toute étape de la guérison il faut persévérer.

Une autre astuce : fonctionnez en cuillères à soupe pour ne pas peser, calquez-vous sur vos proches si vous mangez en famille. Autorisez-vous à manger des aliments sans connaître ni le poids ni les calories, parfois puis de plus en plus souvent.

Et surtout même si je sais que vous le savez mais que l’appliquer c’est plus compliqué :

  • les calories ne sont jamais exactes, il faut prendre en compte l’énergie pour les digérer,
  • votre balance n’est pas non plus exacte,
  • ce n’est pas 100 kcal qui vont changer la donne,
  • vous ne pouvez pas non plus savoir ce que vous dépensez.

On en vient alors à l’activité : aujourd’hui presque tous les téléphones font podomètres, des montres nous indiquent le nombre de calories dépensées… Pour me libérer de ce chiffre, j’ai essayé d’éviter de regarder mon téléphone (et surtout je ne me suis pas acheté de montre car je sais l’effet pervers que cela aura sur moi).
Je me suis calée sur les autres.

Je me suis demandé : si tu n’avais pas vu que tu avais fait « que » X pas, aurais-tu aussi été à pied à ton rendez-vous ?

Là aussi, ce détachement s’accompagne de nombreuses angoisses qu’il faut affronter : manger même si je suis restée assise, apprendre à se reposer. Il existe plein de manières d’occuper son temps plutôt que d’errer dans les rues : lire, dessiner, cuisiner, apprendre, aller au cinéma, regarder une série, jouer aux cartes avec des amis, aller prendre un verre…

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Se libérer des chiffres est très difficile car ce sont eux qui sont utilisés par le corps médical pour juger de notre état physique et aussi parce que ce sont parfois eux qui nous permettent de savoir si l’on agit correctement. Assez manger, peser assez, ne pas trop marcher.

Malheureusement c’est aussi une véritable prison qu’il faut apprendre à lâcher pour réapprendre à vivre selon ses envies et besoins actuels. Comme je dis souvent « Si le thermomètre dit qu’il fait 25°C mais que vous avez froid, vous allez rester en débardeur juste parce que « à 25°C on ne met pas de pull » ? ».
Non vous allez vous couvrir. Alors si votre corps vous dit que vous avez faim, mangez, que vous avez envie d’un gâteau mangez-le, ou que vous êtes fatigués, reposez-vous. Quoiqu’en disent les chiffres.

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