J’ai grandi en souffrant d’hyperphagie

Je n’aime pas l’idée de lire sur les blogs et forums tout ce qui fait attrait aux TCA et plus particulièrement à l’hyperphagie.

Je n’aime pas voir des internautes raconter qu’ils se sont battus pendant plus de vingt-ans contre l’hyperphagie, ou qu’ils ne s’en sont toujours pas débarrassé. Je déteste ça.

J’ai vingt-ans et je n’arrive pas à m’imaginer continuer ainsi pendant des années.

Ce ne sont que des crises, elles passeront demain.

On s’achète une nouvelle tenue de sport et un nouveau mélange de poudre protéinée et tout rentrera dans l’ordre. Mon erreur/goûter à 6 000 calories disparaîtra demain parce que je me suis promis qu’au réveil, elle ne sera plus là.

Cela fera huit ans que tous les matins au réveil, je me fais des promesses à moi-même et voilà maintenant huit ans que tous les soirs, je me revois faire la même chose encore et encore. Des crises longues, interminables, douloureuses.

J’aimais bien l’idée de ne pas en parler, de me mentir à moi-même, de me dire que c’était passager et que je pourrais m’en sortir seule.

La vérité est la suivante : je vis dans cette boucle temporelle qui me fait faire les mêmes erreurs chaque jour, qui me rend malheureuse chaque jour, qui concrètement me donne l’impression d’être bloquée mentalement comme physiquement, qui me limite.

Element de contexte…

J’ai un tempérament impulsif et j’ai extrêmement de mal à gérer mes émotions et celles des autres. Je suis une éponge, j’aspire tout ce qui m’entoure : les mauvaises nouvelles, les journées des autres, leurs problèmes et les miens. Je ne sais pas quoi faire de tout ça.

Mon issue de secours : l’hyperphagie.

Elle s’est installée lentement par le biais de mauvaises habitudes alimentaires, mais est maintenant partie intégrale de mon quotidien.

• A 10 ans je bois du vinaigre pour calmer mes crises et me faire plus rapidement mal au ventre, toujours en cachette,
• A 12 ans, je rentre dans un centre spécialisé pour enfants avec TCA. J’en ressors convaincue que tout ça est derrière moi (quelle erreur !), c’est le combat d’une vie qui ne s’arrêtera jamais,
• A 18 ans, après le lycée je perds 30 kilos en un an : je suis fière, je me sens belle, mais je n’ai jamais été aussi mal psychologiquement parlant,
• Pendant mes années de fac, je reprends lentement mais sûrement le poids perdu : j’alterne entre crises et période de restriction extrême.

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Rien ne semblait fonctionner : objectif sportif, écriture d’un journal, discussion avec mes proches, rééquilibrage alimentaire. Rien ne fonctionne.

J’écris ici pour me soulager, me donner une nouvelle chance.

Il faut savoir être indulgent avec soi-même.

Je parle du point de vue d’une personne qui grandit avec ce trouble alimentaire.

Je ne veux plus qu’il me définisse, j’ai grandi pour autant, je n’ai pas trouvé de solutions pour sortir de l’anesthésie mentale que m’apporte ce TCA. Toutefois je sais que ce n’est pas quelque chose que je veux transmettre à mes enfants et mes proches : cette peur, honte, frustration constante.

Elle influe sur nos interactions sociales, notre morale, notre motivation, sur toute notre personne et notre monde. Je veux grandir et en parler. Je veux grandir et tenir mes promesses. Je veux grandir et comprendre que si je n’y arrive pas ce n’est pas grave, c’est une occasion d’essayer encore.

Je veux grandir et trouver ce qui m’aidera. Je veux grandir et réussir à affronter ce qui me faisait si peur étant enfant : l’hyperphagie.

Je veux grandir et pouvoir dire : voilà comment j’ai fait.

N’ayez pas peur !

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