Lorsque j’ouvre mon dressing et que je regarde mes vêtements, je peux observer de jolies couleurs et des matières différentes pour m’accompagner au fil des saisons.

Mais en y regardant de plus près, ces habits ont une histoire et une petite particularité, leur taille…. Mon placard va du 32 au 44 !

Ils retracent en fait mes 12 années d’anorexie/boulimie. Un combat, des victoires, des défaites, bref, mon histoire.

Au départ, un pantalon trop serré, des moqueries et la perte de mon père me font plonger. Je commence à éliminer certains aliments et je me dépense beaucoup. Je perds une taille rapidement, ô bonheur ! Enfin ça ce n’est que le début, car les tailles baissent, et les restrictions sont encore plus importantes, au point de devenir critique pour ma vie. Mieux avec une taille riquiqui ? Je le pensais mais en fait non ! C’est pire. Mon corps réclame et veut vivre, la tête est mise de côté et l’instinct reprend le dessus.

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Les tailles remontent, remontent, oups, là je ne contrôle plus rien. Je me laisse aller, plus aucune barrière, plus de limite. Les aliments défilent, les quantités explosent. Toujours pas bon, je me sens mal et perdue. Je n’assume plus ce corps, je ne le comprends plus ! Pourquoi je me suis tant laissé aller, je suis honteuse et me déteste.

A côté de ça, ma vie personnelle et professionnelle en ont pris un coup.

Je suis dépressive, mes amis me fuient, ma famille ne sait plus comment réagir,

mes parents tombent en dépression et je manque de perdre mon travail. Au final, j’ai mis de côté une vie de jeune adulte, pour me consacrer à une maladie qui m’a pris ma jeunesse.

Heureusement, une belle rencontre me fait oublier quelques temps mes travers.
Un nouveau régime, pour rentrer dans une belle robe, je m’impose un rythme de repas en fonction des jours de la semaine. Des aliments interdits de nouveaux, des crises nécessaires pour mon équilibre. Bref ça ne va toujours pas, cette maladie m’accompagne toujours.

Je reçois un beau cadeau de la vie, une petite fille. Heureuse maman du côté pile, et maman dépressive du côté face. Galvanisée par les émotions, je recommence à ne plus manger, et en 2 mois, je suis moins lourde qu’avant ma grossesse !

Je retrouve cet « équilibre », me priver la semaine et me lâcher les weekend end. Que je suis naïve…Les repas sont devenus un enfer, les écarts me font peur, je fuis tout repas collectif, plus aucun plaisir. Je fais vivre un enfer à mon mari, contraint lui aussi de prévoir des sorties restaurants en fonction de moi.

Un jour, l’électrochoc, mon souhait de second enfant n’arrive pas à aboutir. Médicalement, on m’a donné 6 mois pour me refaire une santé pour commencer un traitement.

Là, je réalise, 10 ans de souffrance où je me suis imposée des rythmes alimentaires farfelus, pour finalement faire un yoyo dingue avec mon corps. En faisant le bilan, je me dis que ce que je pensais bon pour moi m’a finalement détruite. Je n’ai pas plus de confiance en moi, je n’accepte toujours pas ce corps, et à cause de cette maladie, je vois certains rêves s’éloigner.

Je suis perdue, comment faire, hors de question de continuer ainsi à me priver et à ne m’autoriser que quelques écarts qui finissent en culpabilité. Je trouve une nutritionniste spécialisée avec qui j’échange beaucoup et qui me permet de dépasser certaines barrières et mieux comprendre mon corps.

Je comprends que mon corps est mon ami et non mon ennemi, je veux le rendre plus fort et sortir de cette impasse. Pour ce faire, je dois l’écouter et aller au-delà de mes peurs sans repartir dans des travers qui me coûteront encore ma santé. Je prends un programme établit par une personne spécialisée en nutrition avec une alimentation saine combinée à du sport.

1ère étape, faire confiance au programme. Il comprend des aliments complexes et interdits pour moi avec des quantités importantes. On ne lâche rien, pour une fois, on va prendre les choses au jour le jour. Je l’adapte en fonction de mes envies, pour éviter la frustration et ma nutritionniste garde un œil dessus pour me guider au mieux.

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Très vite, je reprends goût à la nourriture, et à l’activité physique pour le plaisir et non dans l’objectif de dépense sans limite. Je mange des choses essentielles pour mon corps, pour le faire fonctionner de nouveau et assez pour répondre au besoin de celui-ci.

De nouvelles sensations apparaissent, je ne suis plus fatiguée et retrouve une nouvelle énergie. Je suis plus souriante, le regard des gens change, je reçois beaucoup de compliments sur ce renouveau.

La combinaison avec le sport fonctionne bien et je trouve un bon équilibre.

Les crises s’éloignent et surtout la pression que j’avais sur les rythmes que je m’imposais s’estompe. Je n’ai plus besoin d’attendre le dimanche pour manger les aliments interdits, mais je laisse mes envies faire et mon corps s’auto-régule.

Conséquence, un dimanche est devenu un jour normal ou ne pas criser ne me laisse pas un goût de frustration. Je peux partager des moments de convivialité autour d’un repas sans angoisser, et sans me restreindre avant ou après celui-ci.

Aujourd’hui, les quantités des aliments se sont stabilisées et je n’éprouve plus le besoin de me remplir parce que demain je ne pourrais pas. Ma vision des repas et de la nourriture a complètement changé, je choisis mieux mes aliments pour faire du bien à mon corps que j’ai tant martyrisé.

Au final, j’ai fait confiance à mon corps et il m’a remercié. La maladie s’éloigne et les repas ne deviennent plus une contrainte, des calculs, de la privation. Je suis libérée.

Parfois il y a encore des moments de faiblesse et des doutes que je balaye vite en repensant à ces années de galère. Chaque personne est différente, avec une morphologie qui leur permet de vivre et de construire un avenir. Ressembler à un idéal « Instagram » ou magazine de mode n’est pas vous, le plus important c’est se sentir en confiance pour pouvoir être bien et en harmonie avec soi.

Lorsque que l’on a compris cela, tout le reste est positif, il faut aller au-delà de ses peurs pour avancer et arrêter d’être pris au piège d’une maladie qui n’apporte que de la souffrance, de la honte et du désespoir.

Il ne faut pas brûler les étapes et être accompagné des bonnes personnes, la maladie met des mois à détruire et il en faut autant pour la combattre. C’est un long travail sur soi et il est nécessaire.
La peur n’est pas une barrière elle est un leitmotiv pour avancer et vous prouver que vous avez cette force pour aller au-delà. Le plus important est de ne pas analyser sans cesse les sensations, de rechercher le pourquoi du comment ou encore de comparer des situations à d’autres.

C’est vous qui avez entre vos mains les clefs de votre vie, les choses les plus durables et épanouissantes se cultivent à l’intérieur de soi.

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